Opération Bituron (Chant XVI)

Publié le par Jovialovitch


 

2.


     Les derniers moments de l'opéra bouleversèrent Aïdigalayou et le remplirent, comme un calice, de tout l'or de ces notes façonnées par Schtroumpf, agitées par Vaysse, et amalgamées aux voix d'airain de La Berezina, et de La Castelli, sublimes entre toutes. Il Biturono laissait ce soir-là aux spectateurs, un souvenir qui n'était pas près de s'oublier ; Aïdigalayou se retenait de pleurer car déjà tout l'opéra, qui s'achevait à peine, lui revenait avec une puissance incroyable, dans un souvenir immédiat qu'il ne pouvait écarter, alors il luttait et atteignait en même temps un sommet d'extase incomparable. Thierry Vaysse, de son côté s'effondra sur la scène alors qu'il s'apprêtait à saluer ; Aïdigalayou crus qu'il était mort, et songea qu'une telle façon de mourir était bien belle pour un homme, aussi pourrait-on dire dorénavant que « Thierry Vaysse est mort sur scène » et cela ferait de lui non seulement un mythe, mais encore l'homme que Karl Schtroumpf a tué, bref, un martyr ! La Berezina semblait insensible à sa prestation géniale, et son seul souci était d'avoir davantage brillé que son ennemie jurée, La Castelli qui était, elle émue par une soirée mémorable, historique, bien que la présence de La Berezina gâchait quelque peu sa joie. Et il n'y avait plus de Thierry Vaysse pour réconcilier les deux diva ; Aïdigalayou eut une pensée pour Karl Schtroumpf qu'il aurait tant voulu connaître, mais celui-ci était d'un autre siècle.

     Les applaudissements ne cessaient plus dans le théâtre, et le désir le plus ardent du public aurait été que l'on rejoue tout l'opéra, dans sa totalité, mais cela était impossible ; qui allait remplacer Thierry Vaysse ? En revanche, on rejoua dans une émotion profonde l'aria du Cap sur La Rochelle, que chantèrent en duo, les deux cantatrices. Aïdigalayou, qui ne pouvait être fatigué par un tel ravissement, se sentit vivant comme jamais, et il quitta enfin l'opéra, non sans un peu de tristesse, mais enfin, son exaltation reprit vite le dessus, et il se répétait, indéfiniment : « Cap sur La Rochelle ! Cap sur La Rochelle ! »



3.


     Soudain, il pensa à son hôte, sa seigneurie bituronesque qui était sans doute de retour en son humble manoir, Aïdigalayou s'apprêtait à retrouver son ami, seulement il ne se souvenait plus où se trouvait la demeure du Bituron, et, alors, il continua, droit devant lui, descendant sur la ville, plongée dans la nuit, dans le silence, dans la solitude ; la ville est décidément morte, pensa Aïdigalayou , si au moins je pouvais retrouver là où habite mon hôte ! Il essayait de se ressouvenir des endroits où ils étaient passés, mais ce n'est guère qu'à son intuition que se fiait Aïdigalayou qui oubliait par ailleurs sa quête, périodiquement, car la musique schtroumpfienne ne s'était point encore envolée de sa tête et, reprenant le dessus sur tout, il chantait sans fin « Cap sur La Rochelle ! Cap sur La Rochelle ! »

     Puis, se rendant à nouveau compte qu'il ne savait pas où il allait, il se demandait s'il allait chercher toute la nuit la maison de son cher ami, peut-être n'était-il même pas rentré chez lui, pensa Aïdigalayou. Et s'il s'était évanoui en cours de route ? Et si on l'avait enlevé, palsambleu ; son état était si faible ! Alors Aïdigalayou s'arrêta net, il aperçut à ce moment une étoile filante qui filait dans le ciel noir ; « Mon dieu ! C'est le signal ! se dit-il. » « Oui, le signal ! ........l'Opération Bituron ! » et il disparut dans les ténèbres de la nuit. « Cap sur La Rochelle ! Cap sur La Rochelle ! Cap sur La Rochelle !... »

Publié dans Carpatisme(s)

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C
Ceci est un commentaire à effacer, car il n'est absolument pas en lien avec l'article. quoique.<br /> "Cap sur Saint Etienne" sera le mot d'ordre de Coline, Melissa et moi, lundi soir prochain.<br /> repondre-vous à notre appel?<br /> <br /> vous saluant votre ami,<br /> christophe point
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