Louis Vidal, nous voilà ! - De Clovis à Sarkozy (9/10)

Publié le par Jovialovitch


13.

 

NEKUIA – 9/10

Mon Général...

 

     Louis Vidal, pauvre âme qui vécue sous le glas de la souffrance et de la déchirure ! Être qui ne pensa qu’aux travers des lames de l’hésitation. Homme d’honneur dont les choix engagèrent toujours plus que lui. Qu’il est difficile, d’être de tous les hommes, le plus français !... Alors, dans le dévastation, la colère et l’horreur des champs de bataille, voici qu’il s’effondrait d’affliction, agonisant aux confins de la douleur, tels ces millions d’hommes, qui au travers des siècles, de Clovis à Sarkozy, sont morts pour la France. Et le pauvre Louis Vidal repensait à ses ancêtres, qui avaient tous fait don de leur personne à France, élevant ainsi de génération en génération, le plus glorieux arbre généalogique de la République !... Et Louis Vidal en était la fleur, la suprême consécration, l’aboutissement final de plus d’un millénaire de gloire et de vaillance !... « Le plus français de tous les hommes ! » criait soudain une voix reconnaissable entre toutes. « Général ? » « Lui-même !... Rappelles-toi, Louis Vidal, moi qui fut Président et qui serpentait fameusement les routes de France, moi qui dormait au cours de mes voyages dans les maisons de mes braves concitoyens !... Souviens-toi je te pris, Louis Vidal, qu’en plus d’en être le plus illustre, de tous les français, j’étais surtout le plus grand : deux mètres !... et qu’ainsi je ne trouvais pas de lit à ma taille, pour dormir dans les belles provinces de France !... Aussi, pour mes voyages intérieurs, faisais-je fabriquer spécialement des lits à ma taille, des lits immenses, que nous installions dans les chambres d’amis des chaumières où je passais la nuit. Ces lits restaient après mon départ, comme des reliques sacrées, traces indélébiles de mon passage !... Veux-tu que te dise ?... Ces lits immenses et sanctifiés, où j’avais dormi, moi, le Général, moi l’homme du 18 juin, l’un d’eux n’a pas servi qu’à moi seul !... Oui, Louis Vidal : car un beau jour de printemps, deux jeunes tourtereaux, d’un grand patriotisme, se trouvaient devant ce lit où je m’étais régénéré !... Aussi, l’amour que ces deux êtres se portaient l’un envers l’autre se mêla à celui qui les liait à leur patrie ! Et ainsi, cédant à l’appel du rut, ils s’unirent d’amour dans ce lit présidentiel et généralissime ! Et c’est là que tu fus conçu, toi, Louis Vidal, plus français de tous les hommes, car ces deux tourtereaux, c’étaient tes parents ! » « Général ! » Louis Vidal vit alors l’âme du Général, droite et fière, devant lui, comme au plus grandes heures de l’histoire du siècle vingtième. Et comme dans son rêve, le général tenait une femme nue, endormie dans ses bras, drapée d’un drapeau bleu blanc rouge… « Mon bon Louis Vidal, je ne t’apporte pas de bonnes nouvelles. Il ne te reste pas grand-chose, en effet ; et peu d’espoir, je le crains. Mon dieu, comme la douleur m’étreint. Tu as vu les guerres franco-allemandes, mon bon Louis Vidal, et tu fus bouleversé par elles !... Je sais. Comment ne le serait-on pas ? Mais vois-tu, Louis Vidal, la guerre et la nation, cela va, hélas, de paire. Alors cela certes est horrible, mais c’est ainsi, et puis c’est à ce prix que se paye la fraternité, et la souveraineté, et le plaisir d’avoir une place en ce monde... Une terre, Louis Vidal, être né quelque part, et avoir le courage et l’audace d’assumer ce quelque part, et ceux qui y sont nés, voilà ce que c’est que la nation. Faire partie d’un tout qui nous dépasse, nous et les autres, nous et la temporalité humaine, un tout qui nous place dans une longue lignée, millénaire et éternelle, qui va de Clovis à Sarkozy, voilà ce que c’est que la nation, quelque chose qui n’est plus là, et qui est pourtant présent : en nous, au plus profond. Et cela se défend, ami. Sache bien que j’ai vu la seconde guerre franco-allemande, la première guerre à avoir emporté le monde entier ; sache que j’y ai participé – dans les tranchées. Sache aussi que parmi tous les acteurs de la troisième guerre franco-allemande, je suis l’un des plus importants. La France, subissait alors la pire débâcle de son histoire, elle s’effondrait la pauvre, et se trahissant elle-même, voilà qu’elle se livrait toute seule à l’ennemi… Ma mission m’apparue d’un seul coup, claire et terrible. Je devais résister. Moi qui n’était rien, je devais incarner ce pays qui était le mien, et le garder, auprès de moi ! Je devais sauver la France… c’est Jeanne d’Arc qui me l’a dit. Je devais la sauver parce que j’en faisais partie ! Parce qu’elle était moi, aussi !... Parce que la nation, c’est le lieu suprême de la spiritualité, Louis Vidal : la trahir, comme l’a fait le Maréchal, c’est le crime absolu ; la sauver, n’est-ce pas l’acte le plus puissant qu’un homme puisse faire en sa vie ? Mourir au champ d’honneur, cela à tout de même plus d’allure que de crever d’un ulcère au fond du lit ! Mourir pour ce quelque chose qui nous dépasse,  pour ce quelque chose qui engage le présent autant que l’avenir, mourir en héros, pour des millions d’autres qu’on ne connaît pas mais que l’on sait être les siens, voilà le sacrifice, voilà la sublimation pour un homme mortel !... Et puis après tout, n’oublie pas : on ne gagne pas une guerre en mourrant pour son pays, mais en faisant en sorte que l’ennemi meurt pour le sien ! Et c’est cela que le militaire doit comprendre. C’est cela que j’ai compris. Allons, Louis cesse tes pleurs. Les guerres franco-allemandes ne sont plus qu’un lointain souvenir. Il te faudra pleurer pour autre chose, maintenant. Car vois-tu dans mes bras, cette femme que je porte : cette femme, mon petit, c’est ce qu’il reste de la France !... un cadavre endormi !... et dire que la grandeur et la France ne faisait qu’un naguère ! Mais la grandeur a quitté la France ! L’histoire ne loge plus à Paris ! Et la Lumière ne vient plus de l’hexagone ! La France n’est plus vraiment la France maintenant qu’elle est petite. La France n’est plus vraiment vivante depuis 1815. Elle n’a fait qu’agoniser, ombre d’elle-même, dans le sommeil. Cela se nomme le déclin. Oh ! Flétrissure de l’échec ! J’ai fait tout ce que j’ai pu, Louis Vidal, oui, j’ai fait tout ce que j’ai pu pour lui rendre de sa superbe, à ce pays que j’aime, mais c’est inutile : je n’ai fait qu’agiter son cadavre, en faisant croire au monde qu’il était encore vivant !

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