Les Carnets du dictateur, les victoires du printemps II

Publié le par Jovialovitch


16 de mai

 

            On est heureux toujours dans les verts herbages sous le retour liturgique des hirondelles parmi la lenteur des adorations mystérieuses de la renaissante saison où le vent enfin harponne nos cheveux, les saisit et les lie dans les parfums des cortèges floraux. L’éternité de notre amour ne fait plus de doute et l’infernale danse dans laquelle nous sommes entraînés ne peut s’enfuir. Miracle de la nature à la gorge liquoreuse qui nous délivre ses chants de glorification de ses voix suaves. Miracle de la nature, de ses yeux qui nous éclairent même la nuit près des lacs et des villages assoupis. Ma petite dictatrice c’est ma fleur qui bourgeonne, c’est la nature en éveille, et la nature en éveille, c’est moi. Et dans nos têtes, dans nos mains, dans nos rotules, raisonnent l’agitation de notre amour ; et la fureur brûle, au feu de dieu. Et j’exécute ma parade nuptiale sous les cris possédés de ma prisonnière qui étreint mon emprise. Désormais elle ne peut plus m’échapper ; aussi, ai-je marqué mon territoire. Me voilà en parfait dictateur, en dictateur de l’amour, de la passion la plus noble, celle contre laquelle viendront se fracasser les résistances hostiles. Mes pouvoirs de jadis sont aujourd’hui sortilèges et l’on ne peut m’en défaire. Ma férocité sera toujours supérieure à toutes les ruses. Laissons donc les nuits, l’herbe et les édredons d’étoiles nous recouvrir de leur profondeur épaisse ; laissons les lutins papillonner et les papillons lutiner, embrassons-nous et virevoltons, nous les académiciens de la nature.

            Chaque journée et chaque nuit nous flânons, silencieux dans la gaieté du royaume de la nature dont nous sommes les seuls princes souverains. Ma princesse est épanouie, le voit-on dans le profond de ses yeux et dans les arômes de son âme. Moi-même je suis exalté, mais surtout nostalgique et mélancolique. Ce n’est pas tellement de la tristesse mais cette impression d’avoir raté quelque chose, l’inquiétude d’avoir oublié quelque chose à la maison avant de partir. Cela n’a pas d’importance pourtant il faut m’en débarrasser et reconquérir l’insouciance. Mais hélas, je suis trop occupé pour conquérir quoi que se soit, je ne voudrais que l’oisiveté, me délasser et demeurer en paix pour toujours. Alors laissez-moi tranquille, je vous prie. Laissez moi. Laissez-moi tranquille, saloperies de mouches qui ne cessent de me picoter ! laissez-moi tranquille, bestioles piquantes qui m’irritent mes jambes ! Laissez-moi tranquille !!!

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