8 - Ses Epaules

Publié le par Lukaleo

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       Je te vois, je te regarde, je t’observe. Tes épaules, rondes et renflées comme des plaies éraflées, dessinent sur ton corps les liens convexes qui l’élargissent en de multiples esquisses. Elles sont là, comme deux pommes golden au bout d’une branche, célestes et suspendues comme une note aiguë et haut perchée, que l’attraction terrestre ne vient plus chercher. Ce sont comme deux bulles de savon ovalaires qui se suivent en baptême de l’air, deux gouttes d’eau sur la même ligne qui chutent façon « chant du cygne » , deux quignons de pain séparés par les miches du lendemain, deux clair de lunes trop blêmes aux teintes beethovéniennes. Ils sont tous deux les hauts chapiteaux doriques des colonnes ioniques que sont tes bras chics, les deux points de départ aux bras élancés qu’ils fixent sur ton tronc, les liens indéfectibles et alambiqué d’articulations sous-jacentes.

        Comme la surface lisse et lustré d’un galet estival ou d’un pavé sociétal, elles sont lourdes, puzzles osseux quintessenciés tel meuble de sciure cartonnée à la suédoise. Tout peut bouger en de multiples endroits, comme le moteur subtil d’une vieille automobile, et comme l’ogive héliport d’un robot plaqué or, elles se meuvent en de vastes mouvements fastes, baroques et biscornues valses des membres, où avant-bras, cou et os saugrenus cillent ensemble en virevoltant de haut en bas tels les tourbillonnantes robes gonflées des danseuses viennoises enivrées. Tes épaules sont comme les rideaux beiges hissés par le souffle d’une fenêtre ouverte derrière eux en maison venteuse : ils semblent se laisser bouffir par une force mystérieuse que l’on peut écraser du doigt, ils semblent à la fois si satiné et irrégulier que l’on voudrait s’en approcher pour mieux les contempler.

        Tes épaules sont comme des vallées qui succèdent à la montagne immense et pentue qu’est ton cou. Dans un dénivelé abrupte, la col alpin s’achève et le sol soudain plus souple reçoit les sueurs déversées sur les haut plateaux de ton visage larmoyant. Tes épaules ne sont que des monts du Forez qui font face avec vigueur à l’Everest carpatique de ton cou : deux membres qui font jonction avec ton cœur, en faisant rejoindre aux restes du corps tes bras ou ta tête. Je voudrai poser mes mains sur tes épaules, les mordre à pleine dent, croquer dans de leste brillant, mais de ma bouche acéré je n’aurai pas cette utilité, et me servant de mon élocution olympienne, je te dirai la phrase saine : Je t’aime.

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A
Une sacrément bellle déclaration paysagée!
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