Les Carnets du dicateur, seconds préludes

Publié le par Lukaleo

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2 de août

La journée d’hier ne m’a servi a rien. Peut-être est-ce réciproque. Toujours est-il que j’ai reçu une sorte d’imbécile heureux qui venait demander des subventions pour une invention qui permettrait à mon humble personne de s’assurer un culte point négligeable. Je le laissais bavarder sans l’interrompre et portait une fausse attention à ce flot de paroles qu’il déversait sans souffler. Au bout d’un demie heure, un peu préoccupé par la durée de son exposé, je faisais semblant d’être perdu dans mes pensées afin qu’il veuille bien me laisser tranquille et se retirer face à l’indifférence que je manifestais facétieusement. Emporté dans la fougue de sa narration, il n’avait pas plus remarqué ma négligence que ma simulation forcenée.

Une heure qu’il était là ! Je regardais ma montre, la faisais tomber par terre, la ramassais,  je fredonnais du Beethoven, récitais du Baudelaire et déféquais du Yannick Noah. Rien n’y faisait ; il s’agitait encore comme un procureur, énonçant d’un ton doctoral ses palabres scientifiques insuportables ! A présent, je toussotais, me mouchait et esquissait de légers sourires lorsqu’il me semblait qu’il me regardait. Tout ce spectacle s’inscrivait, à peine l’avais-je joué, dans le dépotoir de l'apathie et de l’échec. Je me croyais bel et bien à bout de solutions quant à l’espoir de le renvoyer dans son asile de fou. Pourtant, me vint une idée en même temps qu’un projet de flatulence qui se trouvaient être une seule et unique chose. Et là, paf ! Voulant donner à mon projet un retentissement wagnérien, je laissais choir un vulgaire vent étouffé qui dégagea toutefois une forte odeur dont je redoute encore la réminiscence. Toujours est-il que les choses n’avaient pas plus évolués !

A cet instant, je compris que ma lutte était sans espérance et me résolut à écouter les propos extravagants du charlatan. Si je ne trouvais rien d’intéressent à entendre, je trouvais le sommeil. Je dus m’assoupir au moins deux heures. A l’instant où je reprenais conscience de mon existence, mes oreilles bourdonnaient de mots que je ne distinguais pas. Nom de dieu ! Ma guenille était encore là, devant moi à se désarticuler pour montrer le but et l’utilité de son invention. A présent, je ne pouvais plus m’y résigner, la réalité était-là ; il fallait que j’use de la parole. Des gouttes de transpiration commençaient à dégouliner de part en part sur mon visage blême. La hantise de ce qui m’apparaissait comme l’ultime solution m’horrifiait à son simple songe. Par chance, il y avait une bouteille de whisky sur mon bureau à ma gauche. Je me levais de mon fauteuil et saisit le litre plein accompagnant mon déplacement d’un léger déhancher dont je ne suis pas peu fier. An nouveau installer sur mon délicieux divan et sous la gestuelle idiote de mon interlocuteur fou, je bus autant que je pu du liquide dégueulasse. Rapidement, je perdis le sens commun et réussit à prononcer quelques mots que je crois totalement inaudibles. Finalement, je parvins à me dépasser et dégurgitât à la gueule de mon visiteur une foison d’insultes et de mépris si bien qu’il reprit son chapeau et déguerpit dans la seconde. Quant à moi, je  finis ma journée aux latrines.

Pas facile d’être dictateur quand on est timide !

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