Journal d’un souffreteux au fond d’un lit

Publié le par Jovialovitch

Souffeteux-copie-1.jpg         Ben voilà que le médecin est reparti ! Un brave gars celui-là, attentionné, sérieux, pis, travailleur ! C’est qu’il vient me voir presque tous les soirs depuis quelque mois, le carabin ! C’est qu’attention, je n’en suis pas tombé sur n’importe quel oculiste, hé ! J’ai un grand esculape, moi ! Et je tiens à lui ! Et il tient à moi ! En même temps, je le comprends… Avec toute les visites qu’il fait avec moi, toutes les anesthésies qu’il ma fait subir, tous les médicaments morticoles qu’il me prescrit en d’interminables kilomètres d’ordonnances thérapeutiques, toutes les radios qu’il me fait faire, tous les arrêts maladie qu’il m’a accordé, je suis assurément son meilleur client. Ah ! Avec tout le pognon que je lui refile, il ne doit pas avoir envie que j’aille voir ailleurs… ou que je meurs ! Et c’est pareil pour mon pharmacien ! Ma femme, la vaillante, elle va à la pharmacie avec un cadis, comme chez Carrefour… Elle a sa liste, elle regarde les rayons, elle zieute si y’aurai pas des fois une bonne promotion quelque part en tête de gondole… Tout un travail, la besogne ! Même le pharmacien a du s’adapter : il a fait installer une tapis roulant dans sa boutique, avec une caissière et un rayon magnétique rougeâtre… c’est dire !...

     Non mais à part ça, faut bien avouer que je suis malade comme un chien… Je suis chétif, désaxé, souffrant, et un brin valétudinaire, pour te dire un peu mon supplice… Déjà, j’ai de la fièvre… J’exsude comme un cochon, je trémule comme une feuille, et je délire comme un aliéné… On dirait Nietzsche à la fin de sa vie… enfin ça c’est normal, j’ai aussi la syphilis, je crois bien. Pis alors, j’ai des maux de têtes affreux. Terrible ! J’aurai presque envie qu’on me la coupe, pour que ça cesse ! Des affres dans le crâne que j’ai, une douleur amer qu’y a dedans, comme si y’avait quelque chose à l’intérieur… Mon médecin appelle ça une tumeur. Mai il l’appelle comme il veut. Moi ça me fout une gueule de bois du tonnerre, et c’est insupportable ! Et je ne parle pas de ce rhume qui n’en finit pas, ni de ces rages de dents, qui commencent à me courir sérieusement sur la haricot, lequel ne fonctionne plus très bien, dans la mesure où je pisse des lames de rasoirs !.... Et puis, j’ai du cholestérol !

       J’ai l’impression d’être une grosse machine en panne, grippé, plissé que je suis. Toutes les parties de mon corps ne marchent comme il faudrait ! C’est révoltant… J’en ai marre de ces vomissements, de ces diarrhées, de ces saignements de nez, de ce sommeil qui me plombe le moral ! Quand cela va-t-il finir ? Et comment que ça va finir… Va bien falloir que ça cesse d’une façon ou d’une autre ! De toutes façons, maintenant que j’ai plus mes jambes à cause de la gangrène, je ne vois plus trop comment les choses pourront redevenir comme avant… C’est comme ce cœur, l’ordure, qui me fait mal, et qui peut s’arrêter n’importe quand ! Je commence sérieusement à en avoir assez d’être un cardiaque ! Et puis cet asthme ennuyeux qui m’empêche de respirer comme je voudrai, merci bien ! Non, vraiment, je suis malheureux ! Avec ce diabète et ma prostate ! En plus, je suis un poids pour ma famille, je le vois bien !... Et puis, j’ai du cholestérol !...

        Non, sincèrement, j’en ai marre de ces lits d’hôpital et de cette fatigue permanente, cette souffrance éternelle qui m’étreint et me tient tout entier : c’est que j’en ai presque oublié le bien-être les gars !  

Publié dans Journaux intimes

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P
Je suis toujours scotchée par tes billets, je te verrais bien les publier au quotidien dans un canard. Dommage ici, ils restent seuls. Et tu as une telle verve. Qui disait que tu étais épuisant!<br /> :)))<br /> Bisous.
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