Les charentaises de la submersion

Publié le par Lukaleo

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Roland avait un sacré courage, mais là n’est pas la question, car Roland avait un sacré problème ; il avait perdu ses pantoufles ! Dans ces conditions, comment pouvait-il marcher plus longtemps dans sa maison sans ses pantoufles ? Je vous le demande ! Car il s’agit bel et bien de pantoufles, bon sang de bois !

Alors, depuis qu’il était rentré du boulot, il y a une heure environ, Roland avait parcouru de fond en comble son humble demeure qu’il connaissait d’autre part comme sa poche, ce qui n’est pas le cas des mauviettes. Mais le résultat était là : sueurs, tremblements, angoisse, claustrophobie, hémorroïdes ; bref,  échec. Plus tard, Roland écrira dans Le Figaro, « Ce n’est pas mes pantoufles que je perdis ce jour là, mais mon identité. »

Les secondes et les minutes passèrent ; plus rarement, les heures aussi. Et toujours rien. Moi qui les range toujours ici pensait Roland en visant et révisant d’une vision panoramique un vieux meuble que lui avait offert sa belle mère dans lequel il plaçait astucieusement ses pantoufles chaque fois que la circonstance l’obligeait, c'est-à-dire, lorsqu’il devait se déloger de son logement, corrélativement bien entendu. Seulement, là, il ne comprenait pas. Pourquoi ne les avait-il point disposé bien sagement dans le mobilier familial ; à cet instant, quelle audace j’ai eu ! pensa-t-il avec effroi. A cet instant, Roland songea sérieusement au suicide.

Evoquant dans sa concavité encéphalique à un acte de malfaiteur pour qui la peine de mort aurait mérité d’exister, Roland pensait finalement a sa femme ; mais non, impossible, elle était partie en week-end à New York depuis dix ans et elle appelle toujours avant de venir. Les voisins peut-être ? Invraisemblable, Roland ne leur avait jamais adressé la parole, mais ils lui le rendaient bien. Et puis c’était des vieux fonctionnaires qu’on s’est même pas se qu’ils font toute la journée alors bon. Non, vraiment, Roland en avait gros sur la patate ; aussi, Roland n’aimait pas l’incertitude.

A cet instant, il eu cependant une idée lumineuse ! « Le téléphone ! » hurla-t-il empressé, esquissant un béat sourire énonçant une incontestable jovialité précisément non dissimulée, par l’expression de se béat sourire susdécrit qu’il esquissait ; ou alors j’ai rien compris. Cavalant, ne s’en décrochant de justesse la rate, Roland posait la main sur son dispositif téléphonique. Exécutant un numéro qu’il semblait perpétrer pour la première fois, tant son indécision était implacable, il déployait subséquemment, une oreille avertie en direction de sa dense résidence. Un couinement reculé retentit depuis le deuxième étage. Entretenant le téléphone décrocher, il s'hâta de sauter sur des sortes de marches régulières qui évoluaient néanmoins vers le haut par degrés, un peu comme dans un escalier d’ailleurs. Arrivé à destination, il fit bander l’ouïe et vit que la sonorité réitérative venait du sud. Il s’y précipitait et fit irruption dans une pièce petite par la taille, mais grande par l’importance qu’il avait, entre parenthèse, totalement négligé auparavant : le placard à balai. Il y retrouvait, à sa plus éminente satisfaction, ses belles et généreuses pantoufles dont il pu enfin s’affubler et se dédaigna avec ironie à raccrocher le téléphone décroché.

Soulagé, ce tragique événement servit toutefois à Roland de leçon et plus jamais il ne perdit ses pantoufles. Oh et puis, il pouvait bien les perdre, de toute façon il avait leur numéro.

Publié dans Nouvelles enivrées

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