Amateur d'art, cet article vous intéresse !

Publié le par Jovialovitch

Portrait de Gertrude Stein, 1904

 

 

« Vous verrez, elle finira par lui ressembler »

Pablo Picasso

 

    Amateurs d’art avertis, passionnés de créations humaines, vous le savez mieux que quiconque : l’Art et la Beauté sont intimement liés. Incontestable postulat que voilà ! Cela étant dit, posons la question, ô combien problématique que voici : quelle est la nature de ce lien, entre l’art et la beauté ? La beauté serait-elle la mère de l’art ? Ou bien l’art le père de la beauté ? L’art et la beauté seraient-ils frère et sœur, dépendant l’un de l’autre ? Ou bien seraient-ils amants, amoureux fous ? Peut-être qu’une fois la nuit tombée, l’art vient faire l’amour à la beauté, avec passion et bestialité, conduisant sa partenaire à l’orgasme créateur, coït de postérité d’où accoucherait, tous les matins du monde, de nouvelles œuvres ? C’est bien possible ! Mais le carpatisme propose une autre théorie : l’art et la beauté sont adversaires ! Ils s’affrontent, et sur le terrain d’une course ! Imaginez un instant : sur la ligne de départ, l’art et la beauté ; le coup d’envoi retentit. Surgit trois possibilités : la victoire de la beauté sur l’art, l’égalité, ou la victoire de l’art sur la beauté. Examinons chacune d’elles, que diantre.

        D’abord, la plus fréquente (surtout par les temps qui courent) : la beauté galope plus vite que l’art, celui-ci étant terriblement lent. Le beau distance l’artiste ! La beauté remporte aisément la victoire, tandis que son médiocre adversaire traînaille à des lieux de là avec, comble de désolation, un point de côté. Certain appelle cette piteuse configuration des choses « l’art moderne ». En vue de la production moderniste, cela ne semble pas complètement dénué de pertinence. En effet, lorsque inférieur à la beauté, l’art perd la course, sa production n’aura pas saisi la beauté, elle s’éloignera de lui, elle va le semer, et il la perdra de vue ! Dès lors, tristesse suprême, l’œuvre sera laide, affreuse, moche, et appartiendra donc au mieux au Carte-Postalisme, au pire au Merdisme.

         Secondement, il arrive parfois qu’il y ait « égalité ». Le beau et l’artiste vont à la même allure. Ici, l’artiste est au même niveau que la beauté ; celle-ci ne lui est pas supérieure : il est capable de la saisir, et ainsi de produire quelque chose de beau. Et en effet, ses œuvre sont jolies, mignonnes, cela se laisse regarder, et sincèrement, il y a du travail, de la technique, peut-être même une once de talent, allez savoir. Cependant, cela n’a pas une envergure extraordinaire ; l’artiste en question, qui certes court aussi vite que la beauté, ne fait cependant que son devoir : produire quelque chose d’artistique, ce qui implique naturellement qu’une pinte de beauté se trouve dans son travail. On n’est donc pas dans le chef-d’œuvre, ni  dans le génie, nous sommes dans le passable, le correct ; l’artiste sait faire ce pour quoi il existe : de l’art, tout simplement.

         Or donc, il y a la forme sublime, extraordinaire, où l’art gagne la course, et où la beauté est battue. L’artiste va plus vite que la beauté !!! Il la distance, il la cloue sur le poteau ! Non seulement, il a les qualités techniques suffisantes pour atteindre la beauté, mais en plus, il possède un génie tel qu’il la double, qu’il a dépasse, la distance et la sème ! Cet artiste là, qui émerge une fois par siècle, ce génie d’éternité se retrouve au-delà de toute normes, il surpasse l’idée même de beauté, et l’emmène où il veut. Tant et si bien que son œuvre une fois achevée, n’est pas à proprement parler belle : la beauté, distancée, n’a pas encore rattrapée son retard sur le génie. Son œuvre est sublime. Elle dépasse tout, le spectateur, le temps, la notion de beauté, et jusqu’à son créateur. Nous sommes dans le chef-d’œuvre, qui ne deviendra beau qu’une fois que la beauté aura regagnée le terrain perdu. Nous sommes dans l’absolu, dans le rare. Dans ce qu’il faut regarder des heures avant de comprendre. Nous sommes dans le chef-d’œuvre, nous sommes dans l’art avec un grand A, et par la même occasion, nous sommes aussi à la fin de cet exposé. Merci de l’avoir lu jusqu’au bout.

Publié dans Carpatisme(s)

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